Le petit guide du travail de la soie

par | 8 Déc 2021 | Techniques de couture | 0 commentaires

🕒 8 minutes

Avec du temps et de la patience, les feuilles du mûrier se transforment en robe de soie.

Proverbe chinois

  Vous le savez peut-être si vous avez visionné ses cours Artesane, la soie est l’une des matières favorites d’Anne-Sarah. Petit tour d’horizon de ce qui définit ce textile, ses propriétés et les techniques de couture à appliquer pour le sublimer. Fibre naturelle considérée comme la plus noble des fibres textiles, d’origine animale, la soie est produite à partir de la bave de certains vers (et plus rarement de quelques espèces d’araignées) lorsqu’ils atteignent le stade de la chenille. Bombyx Morii et Bombyx Tussah, voilà les noms savants des vers à soie, le premier produisant une soie de culture et le second une soie dite sauvage puisque nous ne savons pas le domestiquer.  Appréciée pour sa luminosité et sa fluidité, l’utilisation de la soie en textile trouve ses origines trois millénaires avant notre ère en Chine, avant d’atteindre l’Empire romain d’Orient, puis l’Europe occidentale à la fin du Moyen Âge. Pour en savoir plus sur la découverte de la soie, sa fabrication et sa transformation en étoffe, sachez qu’un article des Cahiers Artesane 4 est consacré à cette belle matière.

     Les fêtes approchant à grands pas, et pour que vous puissiez intégrer la soie sans crainte à vos tenues de soirée, nous avons décidé de vous proposer un article regroupant les diverses armures et tissages de cette fibre, ainsi que des astuces et pièges à éviter pour travailler cette matière. La soie est en effet considérée – parfois à tort – comme une matière difficile à travailler, un « tissu qui fâche », comme nommé dans le cours Artesane dédié à la couture des tissus compliqués. Vous saurez donc tout ce dont vous avez besoin pour choisir votre tissu et réaliser des pièces en soie à la main. Merci à Anne-Sarah pour les explication qu’elle m’a fournies – mes connaissances en textiles et techniques de couture croissent de jour en jour ! C’est aussi ça, travailler chez Artesane.

Les différents types de soie

     Commençons par un petit récapitulatif des différentes armatures et tissages de la soie et les pièces qu’elles permettent de réaliser. Sachez tout d’abord que la soie est la plus fine des fibres textiles, et que le rendu du tissage, quelque soit sa structure, sera toujours assez fin. Je vais vous présenter ces différents tissage de soie du plus fluide au plus rigide, afin de rendre compte de la palette de possibilités qu’offre cette fibre.

La mousseline de soie

     Le nom même de la mousseline, par ses consonnes douces qui glissent sur la langue, témoignent de la fluidité de cette toile vaporeuse. Pourtant, son nom proviendrait de sa ville de fabrication, Mosul, et de ses marchands, les musolini : le hasard fait bien les choses. Fine et transparente, la mousseline convient pour la confection de robes légères et de foulards, mais est également utilisée pour orner les tutus des danseuses, ainsi que pour créer les volants des robes de mariée ou de tenues de soirée. C’est un tissu parfait pour réaliser une tenue de fête.

L’organza

     Voici venir l’organza, cousin plus résistant de la mousseline, et frère jumeau de l’organdi, composé quant à lui majoritairement de coton.

Cet organdi de soie est utilisé pour des robes, des voilages, ou encore des tutus. L’organza a cela de pratique qu’il ne glisse pas, contrairement à beaucoup de tissages de soie, qui ont tendance à fuir. Anne-Sarah l’utilise notamment en pattemouille pour le repassage et le trouve idéal en tant que triplure, pour entoiler son tissu. Je reviendrai sur ce point en évoquant les astuces d’Anne-Sarah pour travailler la soie.

Le crêpe de Chine

     Le crêpe est un tissage à l’aspect frisé et ondulé, comme le montre son étymologie. Le terme vient en effet du latin crispus, qui signifie « frisé ». L’aspect du crêpe de Chine vient de ses fils de trame tordus alternativement dans les sens S et Z, qui en font un tissu à la fois soyeux et légèrement granité. Ce crêpe est une étoffe fluide, idéale pour réaliser des corsages, chemisiers, robes, foulards et écharpes.

Le satin de soie

     Souple, résistant, brillant, soyeux, le satin est une armure de tissage dont les grands flottés formés par ses fils sont la caractéristique. Largement utilisé dans la confection de tous types de vêtements, sous-vêtements, mais aussi en lingerie, haute couture et accessoires, le satin est une matière idéale pour ajouter une touche chatoyante d’élégance à vos tenues de fête.

Le twill de soie

     Le twill est un tissage sergé de 3 avec un aspect oblique, dont le nom vient de l’anglais et signifie « croisé ». En soie, ce tissu est surtout utilisé pour réaliser des cravates ou des foulards. Son tissage permet une meilleure tenue que les matières précédentes à armure toile ou satin.

Le drap de soie

     Le drap est une toile feutrée, plus dense que tout ce dont nous avons parlé jusqu’à présent. Très résistant, il a un aspect velouté et permet de réaliser des pièces un peu plus épaisses, bien qu’il reste assez fin lorsqu’il est composé de soie.

Le chantoung

     Le chantoung est une toile qui tire son nom de la région de Chine dont il est originaire. C’est un tissu beaucoup plus compact et opaque que toutes les autres formes de soie vues jusqu’à maintenant. Son aspect en relief provient des fils épais et irréguliers qui le composent. Il permet de réaliser des pièces plus structurées, et même de travailler les volumes de vos créations en soie.

Le taffetas

     Dans la même idée que le chantoung, le taffetas est très compact au point de tenir à la verticale, contrairement à l’idée que l’on se fait de la soie souple et glissante. Il permet donc de réaliser robes et chemisiers, mais également de sculpter des formes en volume, comme des gros nœuds de ceinture ou des étoles sculptées.

Le jersey de soie

     Le jersey est un tricot, contrairement à toutes les étoffes tissées que je viens de vous énumérer. La soie permet d’avoir un rendu plus fin que les jersey faits à partir d’autres fibres comme le coton, et donc de réaliser des pièces plus légères. Étoffe rare et précieuse, le jersey de soie est souvent utilisé en confection lingerie haut-de-gamme.

Préparer son étoffe

     Maintenant que vous avez choisi votre étoffe, il est important de bien préparer votre tissu afin qu’il soit facile à travailler par la suite, en particulier si votre choix s’est arrêté sur un textile souple et glissant.

     Tout d’abord, s’il y a une chose à retenir, c’est de respecter le droit fil de votre tissu, c’est-à-dire le sens des fils parallèle à la lisière du tissu. Il est par exemple possible que votre tissu acheté dans le commerce soit mal coupé. Dans ce cas, il vous suffit de déchirer une bande dans votre tissu en suivant le droit fil. Pour cela, donnez un petit coup de ciseau sur la bordure opposée à la lisière et déchirez à la main : le tissu se déchirera en suivant un fil et vous obtiendrez une bordure bien droite.

     Une fois que vous avez votre morceau de tissu, il faut l’installer et le stabiliser sur sa table de couture. Retenez qu’il est important d’étaler un tissu souple comme la soie en intégralité pour le travailler. Sinon, le tissu bougera à coup sur lors de vos manipulations. Pour étaler et stabiliser votre tissu, commencez par étaler du papier de soie sur toute la surface nécessaire de votre table. Puis, positionnez votre étoffe de soie et repassez-la. Positionnez le bord de votre tissu le long du bord de votre table, et scotchez-les bien parallèlement à l’aide de ruban adhésif repositionnable.

Empeser son tissu

     Pour stabiliser de la soie et éviter qu’elle ne glisse de trop, afin de rendre la découpe plus aisée, deux méthodes existent. La première consiste à enduire préalablement le tissu d’amidon, comme de la maïzena, dilué dans de l’eau. Cela aura pour effet de rigidifier légèrement le tissu. Attention cependant au dosage, pour ne pas trop raidir le tissu. La deuxième solution, moins contraignante, consiste à vaporiser un stabilisateur industriel comme le Fabulon sur le tissu, de manière bien homogène, ce qui peut se faire une fois que votre tissu est fixé à votre table. Néanmoins, concernant ces deux méthodes, nous vous conseillons de ne les utiliser qu’en dernier recours. Normalement si vous avez correctement épinglé votre tissu et l’avez stabilisé à l’aide du papier de soie, cela suffit amplement. Laver de la soie même à froid et lui imposer une sorte d’apprêt comme l’amidon modifie nécessairement ses propriétés même légèrement. Les puristes ne lavent pas la soie et la nettoie systématiquement à sec pour ne pas ternir son caractère chatoyant. En revanche, la technique employée ici fonctionnerait très bien pour un twill de viscose…fibre que l’on appelle à tort soie artificielle : il n’existe pas de soie artificielle, la soie est d’origine naturelle ou n’est pas. En revanche il est exact de penser que la viscose partage quelques propriétés avec le plus noble des tissus, comme la fluidité : fuyante, légère et ronde, la viscose est parfois bien plus difficile à travailler que certaines étoffes de soie.

Placer le patron, marquer et découper le tissu

     Une fois que votre soie est disposée sur votre table et stabilisée, il est temps d’y placer votre patron et de vous préparer à la découpe. Pour fixer votre patron, Anne-Sarah conseille l’utilisation d’épingles longues et extra fines, si possible à tête de verre. D’autres aiguilles qui ont conquis le cœur d’Anne-Sarah sont les Entomology Pins de Merchant & Mills. Ces fines aiguilles sont parfaites pour cette étape.

     Pour reporter votre patron et marquer votre tissu, l’utilisation de plusieurs outils est possible. Anne-Sarah recommande l’usage du crayon HB, qui marque très bien la soie, mais vous pouvez également utiliser un stylo Frixion ou encore de la craie. Il est dans tous les cas important de tester votre crayon ou autre outil sur votre tissu au préalable, afin d’être sûre de son efficacité sur ce textile.

     Votre patron est désormais placé : il est temps de passer à la découpe. Avant toute entreprise de coupe, Anne-Sarah recommande de passer ses ciseaux à l’aiguiseur, afin d’être certaine de réaliser une découpe propre et fluide, sans accrocs. Il vous suffit ensuite de découper votre tissu et le papier de soie en suivant votre patron. Il est également possible d’utiliser un cutter rotatif, mais cet outil est moins pratique si vous devez effectuer de grandes découpes.

Entoiler un tissu de soie

     Entoiler un tissu consiste à superposer une toile au tissu que l’on souhaite travailler afin de le renforcer et de le rigidifier. Pour des tissus fins comme la soie, Anne-Sarah recommande les entoilages thermocollants TR1 et DS1 de Stragier. Si vous préférez entoiler à la main, vous pouvez superposer de l’organza de soie à votre tissu lors de la préparation de la découpe puis découper les tissus simultanément. Vous pourrez ensuite fixer votre organza à votre tissu en grands points, à la main ou à la machine.

Coudre de la soie

     Nous voici dans le vif du sujet. Anne-Sarah recommande la couture anglaise pour les tissus fin, une couture solide avec laquelle les bords de la première couture sont enfermés entre les deux piqûres, donnant une très belle finition. En ce qui concerne l’aiguille, vous pouvez utiliser une taille 60 pour les tissus très fins comme la mousseline ou une taille 70, mais également des aiguilles microtex dans les mêmes tailles. Pour le fil, il est très important de ne pas utiliser de polyester, qui s’entend mal avec la soie et la fait gondoler. Un fil en viscose conviendra très bien pour réaliser vos pièces en soie. Cependant, si vous souhaitez coudre une pièce importante pour vous et que vous désirez mettre les plus beaux moyens dans cette création, le meilleur choix reste le fil de soie. Rien ne s’entend mieux avec la soie que la soie : croyez-moi, c’est en soi le meilleur choix !

     Une petite astuce enfin pour coudre les tissus fins et transparents : Anne-Sarah vous conseille d’assembler ou de roulotter ces tissus à la surjeteuse, plutôt qu’à la machine. Vous pourrez réaliser de beaux ourlets plus facilement qu’avec une machine à coudre classique !

     Nous espérons que cet article vous aidera à travailler la soie pour réaliser vos tenues de fêtes, et que nous allons pouvoir admirer votre travail de cette fibre dans vos créations pour le défi paillettes, si jamais vous y participez ! Pour agrémenter encore vos tenues d’une touche festive, rendez-vous vendredi pour un article dédié à la pose de paillettes.

À bientôt chez Artesane !

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