La petite histoire du maillot de bain

par | 22 Juil 2022 | Histoire de la mode | 0 commentaires

🕒 8 minutes

     Chaque été, un essayage de nos anciens maillots de bain s’impose pour savoir quelles parures nous arbererons sur les plages, à moins qu’une volonté de nouveauté nous conduise en boutique pour nous procurer une tenue de bain flambant neuve, ou de les coudre nous-même grâce aux cours Artesane. Mais d’où vient le maillot de bain ? Depuis quand en porte-t-on ? et quelles ont été ses évolutions ? Je vous raconte les grandes lignes de l’histoire du maillot de bain dans cette article. Vous pouvez retrouver un article détaillé sur le sujet rédigé par Armelle dans les Cahiers 5.

Dans l’antiquité

     Promenons-nous dans la Rome antique. Suivons cette via jusqu’aux termes de Trajan, sur la colline de l’Oppius, non loin du Colisée. Nous sommes en plein après-midi, à l’heure de forte affluence aux bains publics. Nous traversons les salles jusqu’au caldarium, la salle des bains chauds. Là, une femme sort justement du bassin au milieu de l’atmosphère embuée. Elle porte un léger tissu que la baignade a rendu presque entièrement transparent. À Rome, on se baignait nu ou vêtu de sa tunique, ou encore d’un pagne.

     Rendons-nous maintenant à la palestre, la partie des thermes réservée à l’activité physique. Femmes et hommes jouent à la balle ou luttent enduits d’huile, et portent un pagne de cuir, le subligaculum, auquel les femmes ont ajouté un bandeau de cuir atour de leur poitrine, la fascia pectoralis (voir cet article sur l’histoire du soutien-gorge). Cet ensemble constitue le bikini de l’époque, porté surtout pour l’activité physique.

illustration représentant le fascia pectoralis et le subligaculum

Du Moyen Âge au XVIIIe siècle

     Faisons un saut jusqu’au Moyen Âge. Comment a évolué le maillot de bain en un millénaire ? Aucunement. À vrai dire, il a même régressé et disparu. La raison est simple : contrairement à la Rome antique où le bain quotidien était de rigueur pour la santé du corps et de l’esprit (le mens sana in corpore sano de Juvénal), au Moyen Âge la baignade était considérée comme mauvaise et dangereuse. Et s’il n’y a pas de baignade, il n’y a pas besoin de vêtement de bain.

     Ensuite, jusqu’au XVIIIe siècle, les mœurs se sont encore inversées puisque, si la baignade restait encore très rare, elle était réalisée à des fins thérapeutiques, pour apaiser divers symptômes et soigner des maladies. Ainsi, la Renaissance, si elle incarne la renaissance des mœurs et valeurs de l’antiquité, a fait fi du bain si important pour les Romains.

Au XIXe siècle

     Dirigions-nous donc vers le moment du grand retour de la baignade. Nous sommes au XIXe siècle, au bord de l’eau, mais aucun morceau de peau n’est visible à l’horizon. Nous apercevons cependant une drôle de roulotte à moitié immergée dans l’eau. Il s’agit d’une cabine de bain, à l’intérieur de laquelle une dame est sans doute en train d’enfiler sa tenue de bain à l’abri de tout regard indiscret, et depuis laquelle elle pourra directement entrer dans l’eau.

     Quelle tenue est-elle donc en train d’enfiler pour aller se baigner ? Nous outrepassons le rôle protecteur de la roulotte et jetons un œil à l’intérieur. La femme est train d’ajuster la charlotte qu’elle porte sur la tête et est… habillée de la tête aux pieds ! Corset, robe empesé en bas pour éviter que tout coup de vent sournois ne la soulève, pantalon bouffant, bas foncés, peignoir de bain et même chaussures, notre baigneuse est décidément bien habillée ! Les mœurs de l’époque veulent que les baigneurs gardent l’intimité de leur corps pour eux, et se revêtent ainsi pour aller dans l’eau.

illustration d'une tenue de bain du dix-neuvième siècle
illustration d'une roulotte de bain

La première moitié du XXe siècle

     Nous voici à présent sur une plage française de l’Atlantique, peu avant la première guerre mondiale. Nous observons sur le sable un femme portant une sorte de justaucorps collant sans manches et s’arrêtant un peu au-dessus des genoux. Il s’agit d’un maillot démocratisé par la nageuse Annette Kellerman, à l’origine avec des manches et des jambes complètes. Cependant, nous observons un homme muni d’un mètre mesurant la distance entre le genou de la femme et son maillot. Les maillots que nous observons sur les hommes sont en tous points semblables.

     Si Annette a réussi à démocratiser son maillot en utilisant l’argument de la performance sportive, puisque les maillots bouffants ne pouvaient qu’aider les baigneurs à couler à pic, une police des mœurs parcourait tout de même les plages afin de vérifier que pas plus de cinq centimètres de peau n’étaient visibles au-dessus du genou. Les hommes, également, devaient camoufler leur grosseur sous la ceinture par une jupette large placée au-dessus de l’entrejambe. Il reste donc du chemin avant d’atteindre nos bikinis modernes et nos slips moulants.

     En ce qui concerne les matières, le fabriquant Jantzen sort, en 1915, une ligne de maillots en lainage, qui s’imbibent d’eau et s’alourdissent lors de la baignade. Mais, en 1920, ce même fabriquant dévoile sa nouvelle maille élastique pour créer « le maillot qui a changé la baignade en natation ». Pour poursuivre ces avancées, la société United States Rubber Company crée le matériau Elastex, du caoutchouc recouvert de fibres textiles et gainant. Les maillots sont alors sans manches, décolletés et avec une culotte intégrale. Toutes ces révolutions technologiques ont ouvert la voie au nylon des années 1940 et 1950, et au lycra des années 1960.

     Enfin, dès les années 1930, le maillot deux pièces fait son apparition sur les plages, notamment avec le maillot Atome de Jacques Heim en 1932, appelé « le plus petit maillot de bain du monde », composé d’une culotte taille haute couvrant le nombril, encore jugé beaucoup trop érotique, et d’un soutien-gorge classique.

illustration du maillot Atom de Jacques Heim

La seconde moitié du XXe siècle

illustration du bikini de Louis Réard

     Nous sommes en 1946, à la piscine Molitor, le jour de la célèbre fête de l’eau et de son concours de la plus jolie baigneuse. Au bord du bassin, au milieu d’autre demoiselles en maillots de bain assez classiques pour l’époque, Michelle Bernardini, danseuse nue du casino de Paris, arbore, en guise de maillot de bain, deux triangles réunis par un cordon pour le bas, et un soutien-gorge pour le haut, dans un tissu portant l’imprimé newpaper print sorti par Schiaparelli en 1935. Ce premier bikini a été inventé par Louis Réard, qui regarde, confiant, son modèle défiler.

     Si Michelle Bernardini ne gagne pas le concours ce jour-là, le bikini est officiellement apparu sous son nom. Mais, d’où vient-il, ce nom ? De l’atoll Bikini, dans l’océan Pacifique, où sont réalisés des essais nucléaire. Bikini concurrence donc l’Atom de Jacques Heim puisqu’il est « encore plus petit que le plus petit maillot de bain du monde », mais également la « première bombe an-atomique ». Cependant, il est encore un peu tôt pour que le bikini s’affirme et se démocratise.

     C’est entre les années 1950 et 1970 que le bikini inondera les plages, propulsé par les idoles de cinéma, comme Ursula Andress et son bikini ceinturé dans James Bond contre Dr. No. Le maillot une pièce revient tout de même à la mode, et Rudi Gernreich sort son monokini unisexe en 1962. Bien entendu, le bikini ne cessera de faire scandale par les dévoilements osés des corps qu’il engendre, comme celui du bikini de métal doré de la Princesse Léia dans l’épisode VI de la saga Star Wars.

illustration d'ursula andress dans james bond
illustration de leia en bikini dans star wars 6

     Dans les années 1970, on dénude toujours plus les corps, et le bikini revient donc en force. La décennie suivante, le maillot une pièce devient une pièce de couture, presque vintage, et on n’hésite pas à se fournir dans les grande maisons si l’on en a les moyens. Enfin, dans les années 1990, la resexualisassion des corps voit les maillots deux pièces se garnir de soutiens-gorge à coussinets et à balconnets baleinés pour rapprocher les seins et leur donner du volume, ainsi que de décolletés plongeants à la Pamela Anderson dans Alerte à Malibu.

illustration de pamela anderson dans alerte à malibu

À partir des années 1990

     Concernant les coupes de maillots, la famille des « kinis » s’agrandit de nombreux membres dans les années 1990. Tout d’abord, le bikini classique ne cesse de perdre du tissu, comme le montre le fameux bikini Chanel de la collection printemps-été de 1996. Puis, le tankini apparaît en 1998, constitué d’une culotte et d’un débardeur, suivi par le trikini, le bandeaukini, le camkini, le sling bikini, le skirtini ou encore le burkini.

     Faisons également un petit point sur les matières de ces maillots. Nous nous étions arrêtés au lycra, mais le progrès technologique dans la filière textile ne s’est pas arrêté là. Dans les années 1990 naît le Suplex, un tissu résistant au chlore et gainant. En 1994, avec l’avènement de la peau halée sur les plages, est apparu le tan-through, un tissu à fibres à filtre solaire pour éviter les marques de bronzage.

     Dans les années 2000, on cherche à imiter la nature pour être toujours plus performant dans le milieu sportif. Speedo développe alors le Fatskin qui imite la peau des requins. La combinaison LZR fait également son apparition en 2008. Enfin, Spinali Design conçoit en 2015 le premier maillot connecté, qui prévient son porteur des risques de coups de soleil grâce à des capteurs UV. On n’arrête pas le progrès !

     Voici qui met un terme à notre balade historique aux côtés du maillot de bain. Pour une histoire complète et détaillée sur le sujet, avec les grands créateurs, les phases historiques et toutes les anecdotes autour du maillot de bain, retrouvez l’article d’Armelle dans les Cahiers Artesane n° 5. Vous y trouverez également des patrons et un cours vidéo inclus pour personnaliser et réaliser vos maillots de bain. Et, si vous n’avez toujours pas votre maillot pour cet été, retrouvez notre coffret maillot une pièce Majorelle, notre coffret maillot deux pièces Normandy, et notre coffret maillot pour homme Bretagne.

À bientôt chez Artesane !

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